Continuum : là où l’art et la science cohabitent
Le mercredi 15 janvier 2014
Le spectacle Continuum, présenté depuis le mois d’avril au nouveau Planétarium Rio Tinto Alcan, a remporté en octobre le Prix Excellence de la Société des musées du Québec, soulignant ainsi « sa volonté de combiner l’art, la science et les émotions ».
Par Alexandre Guertin-Pasquier
Quelles sont les raisons derrière ce virage artistique majeur?
Deux tours de métal, tels deux télescopes au regard pointé vers le ciel au pied du Stade olympique. À l’intérieur d’un de ces cylindres, des chaises de patio, des coussins et un paysage aux allures de bord de lac dans les Laurentides : bienvenue au Théâtre du Chaos du Planétarium Rio Tinto Alcan de Montréal.
Le spectacle présenté dans cette salle, Continuum, y est tout aussi déstabilisant que son décor pour un public habitué aux planétariums classiques. Vingt-trois minutes d’images impressionnantes, une animation multimédia digne des meilleures… mais aucune narration ni explication scientifique! Une erreur stratégique, pour un centre dédié a priori à l’enseignement des sciences? Pas selon Pierre Lacombe, le directeur des lieux.
« L’objectif principal du spectacle Continuum est de permettre au public de se faire sa propre représentation de l’espace avant d’être exposé au contenu plus rationnel présenté dans le Théâtre de la Voie lactée et dans notre salle d’exposition Exo, explique M. Lacombe. Nous sommes partis du principe que le mandat d’un musée de science n’est pas seulement d’enseigner, mais aussi d’émerveiller et de sensibiliser le public à une cause. Des attentes auxquelles Continuum répond à merveille sans qu’une narration nous paraisse nécessaire. »
En réalité, cette stratégie de jumeler l’art et l’astronomie est le fruit d’une longue réflexion et a été testée dans l’ancien planétarium à partir de 2009. À cette époque, une pièce de théâtre sur la vie de Galilée avait notamment été présentée dans le cadre de l’année internationale de l’astronomie. « Ces expériences nous ont permis de mieux comprendre les défis d’une création artistique, mais aussi de réaliser l’importance de varier les approches dans l’enseignement des sciences ».
Forts de ces succès artistiques, M. Lacombe et son équipe ont ainsi pu confirmer la pertinence de se doter d’un théâtre au mandat exclusivement artistique au sein du nouveau planétarium. Une idée appuyée par Charles-Mathieu Brunelle, directeur général de l’Espace pour la vie (qui comprend le Biodôme, le Jardin botanique, l’Insectarium et le Planétarium Rio Tinto Alcan) et mise en place grâce aux efforts des créateurs, internationalement reconnus, Michel Lemieux et Victor Pilon.
Cette programmation unique fait du Planétarium Rio Tinto Alcan le seul de son genre à offrir quotidiennement du contenu artistique. Cependant, Continuum, aussi original soit-il, risque de surprendre un public non averti. « Je compare souvent ce spectacleà un tableau représentant un paysage, illustre M. Lacombe. Le modèle de référence est réel, mais tout n’est pas nécessairement fidèle à cette réalité. Rationaliser Continuum serait comme comparer un tableau à une photo : on risque alors d’être déçu, même si l’œuvre est magnifique!».
Selon l’animatrice scientifique Amy Vandal, notamment en charge de cette représentation nouveau genre, les réactions des visiteurs sont très tranchées. « La grande majorité des spectateurs trouve l’expérience audacieuse et très impressionnante. À l’inverse, d’autres trouvent que celle-ci manque de rigueur scientifique, même s’ils sont avertis préalablement de la nature abstraite du spectacle. »
N’en déplaise à certains, la mission artistique du Théâtre du Chaos semble toutefois être là pour rester. M. Lacombe rêve déjà tout haut à une nouvelle exposition sur le temps, de présenter régulièrement des spectacles de marionnettes et même d’y faire construire une réplique grandeur nature d’un bateau pour apprendre aux visiteurs à se repérer grâce aux étoiles!
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Alexandre Guertin-Pasquier est récipiendaire du Prix de la Relève 2013 de la bourse Fernand-Seguin. En stage à l’émission Découverte dans le cadre de son certificat en journalisme, il a écrit les textes du dossier spécial Climat : où en sommes-nous? Il est également chargé de cours au département de géographie à l’Université de Montréal et vice-président du Musée de paléontologie et de l’évolution à Montréal.
