Claude Benoît, une femme d'exception


Le mardi 19 février 2013

Par Louise-Julie Bertrand

Le départ de Claude Benoît est une grande perte pour la communauté muséale. Femme aux multiples talents, la fondatrice du Centre des sciences de Montréal (CSM) est animée par un dynamisme hors du commun. Formée en biologie et en éducation, elle a reçu plusieurs prix, dont la médaille McNeil de la Société royale du Canada en 2004 reconnaissant sa contribution au développement de la culture scientifique et technique.

Son amour des sciences et son désir de partager les connaissances l'animent. Par exemple, elle participe à la création des Clubs des débrouillards aux côtés de Félix Maltais et fonde la revue La puce à L’oreille, destinée aux adolescents. « Ma carrière est centrée sur un seul but : démocratiser la science et exposer les gens à la culture afin de les amener à réfléchir sur eux-mêmes et sur le monde. » Pionnière de la muséologie scientifique au Québec, son parcours professionnel est étroitement lié au développement du CSM.

Musée à vocation scientifique

Fernand Seguin, vulgarisateur scientifique de la première heure, réclame en 1979 la création d’un « Musée national des Sciences et de la Technologie » à Montréal. Quatre ans plus tard, la Société de la Maison des Sciences et des Techniques est créée par le gouvernement provincial et Claude Benoit est chargée d’en élaborer la programmation. Elle est toute désignée pour remplir ce mandat : dans le cadre de Québec 84, elle a réalisé avec brio H2O, une des premières grandes expositions à caractère scientifique au Québec misant sur l’interactivité et l’animation.

Cette première tentative d’instaurer un musée des sciences au Québec achoppe. Claude Benoit décide alors de créer son entreprise-conseil et travaille de très près au développement de projets d’institutions culturelles majeures au Québec : le Musée de la civilisation, la Biosphère, le Cosmodôme, le Biodôme, Pointe-à-Callière, l’Insectarium...

Avec son énergie et son imagination inépuisables, elle est de tous les projets et elle laisse sa marque derrière elle. De 1987 à 1996, elle réalise neuf éditions d'Expotec, ces expositions temporaires d'été essentiellement financées par des entreprises privées et axées sur les sciences, les techniques et la société. Véritable banc d’essai, Expotec permettra à Claude de fourbir ses armes.

En 1989 nait un nouveau projet : le Carrefour des Sciences, des Techniques et de l’Industrie de Montréal, initiative des milieux universitaires et industriels. Un an plus tard le gouvernement fédéral veut créer un Musée des sciences et des Techniques à Montréal. Claude Benoit est en tête de file, bien sûr. Études préparatoires, inventaires des collections, évaluation de sites potentiels, développement d'un concept, mise au point d'un budget et d'une programmation: ce projet se rend très loin avant d'être tué dans l'œuf, faute de fonds et d’un porteur de dossier crédible dans les milieux politiques et des affaires.

Malgré cette déception, Claude connaît de plus en plus les ficelles du métier et continue de nourrir son rêve d’un musée des sciences permanent. Elle parfait son expérience professionnelle en acceptant, en 1994, la direction générale du musée McCord.

Enfin!

1997 : cette fois-ci, c’est la bonne! Le gouvernement fédéral, par le biais de la Société du Vieux-Port de Montréal (SVPM), souhaite mettre sur pied un centre des sciences sur la jetée King-Edward à Montréal. Claude Benoit est recrutée, à titre de vice-présidente Programmation, et mène le projet.

Pour la première fois depuis vingt ans, tous les ingrédients du succès sont réunis. Dans la foulée de l’an 2000, le gouvernement fédéral contribue 29 millions de dollars. Une campagne de financement majeure auprès du privé permet de recueillir 12 millions de dollars, un exploit dans le domaine muséal québécois, attribuable notamment à l’ingénieur Bernard Lamarre.

Lucide, Claude dote l'institution non seulement de salles d'exposition mais également de nombreuses sources de revenus commerciaux afin d'en assurer la survie à long terme. « On ouvre le 1er mai 2000 à 11h! », lance Claude à qui veut l'entendre. Elle tiendra parole. En 2001, elle sera nommée PDG de la SVPM, et continuera de veiller à l’épanouissement du CSM tout en développant activement le parc du Vieux-Port.

Louise-Julie Bertrand est chef Développement et réalisation au Centre des sciences de Montréal.

 

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