Stimuler le goût des sciences chez les jeunes du secondaire


Stimuler le goût des sciences chez les jeunes du secondaire

Le mercredi 21 août 2013

Des élèves québécois se sont rendus en Saskatchewan pour mener des expériences de haut calibre au Centre canadien de rayonnement synchrotron.

Par Jean-Daniel Doucet

Saskatoon, Saskatchewan. Dans un édifice reculé, à l’abri de la lumière du jour, une bande d’ados québécois est hypnotisée par un écran cathodique. Banal, ennuyant… Jusqu’à ce que l’ordinateur s’illumine : « Yeah! Ça marche! » Les résultats obtenus grâce à l’accélérateur de particules sont concluants. Les travaux entrepris par ces jeunes scientifiques de 16 ans dans le cadre du programme Students on the beamline du Centre canadien de rayonnement synchrotron (CCRS) portent fruit!

Le protocole

Le programme Students on the beamline jumelle de vrais chercheurs du CCRS avec des étudiants de 4e ou 5e secondaire afin qu’ils mènent leur propre projet de recherche. Évidemment, transformer des adolescents de 16 ans en scientifiques prend du temps et de l’encadrement. Une dizaine d’élèves sont triés selon leurs aptitudes pour les sciences. Les enseignants responsables, qui font le pont entre les chercheurs et les étudiants, recherchent surtout des participants motivés et disciplinés, prêts à affronter une rigoureuse année de préparation.

« Pendant un an, les profs du secondaire n’ont qu’encadré les étudiants. Chacun des jeunes menait une partie de la recherche. On s’assurait qu’ils gardent le cap lors des réunions hebdomadaires », explique Steve Desfossés. Cet enseignant en sciences au collège St-Bernard de Drummondville a accompagné un groupe d’une dizaine d’étudiants à Saskatoon durant la semaine de lecture en 2012.

Le jargon scientifique peut rebuter l’adolescent de l’ère des réseaux sociaux. « Le niveau d’oxydation du fer (II), ça ne dit pas grand-chose à un étudiant du secondaire! Et franchement, il arrive que les profs aussi doivent apprendre en même temps que les élèves », s’esclaffe Karine Routhier, enseignante au collège Durocher à St-Lambert. Elle a participé au programme Students on the beamline en 2013 avec huit élèves de l’école.

Heureusement, en plus des enseignants, des chercheurs du CCRS sont là pour encadrer les jeunes. « Toutes les 2 à 3 semaines, on bénéficiait des conseils d’un vrai chercheur du CCRS », relate Mme Routhier.

Entourés du professeur Steve Desfossés et de deux chercheurs du CCRS, des élèves du collège Saint-Bernand et du collège Bourget préparent les échantillons à analyser. Crédit photo : Johanne Patry.

L’expérience

« Durant deux ans et demi, les jeunes sont devenus de véritables scientifiques », explique Steve Desfossés. Ils ont eux-mêmes fait les recherches. Peu d’ados de 16 ans peuvent se vanter dans leur CV d’avoir travaillé avec un accélérateur de particules », s’enthousiasme-t-il.

Après avoir établi les protocoles et récolté les échantillons, le petit groupe d’apprenti-scientifiques prend l’avion pour Saskatoon. Pendant une semaine, ils côtoieront les chercheurs du CCRS et leur immense accélérateur de particules. « Sur place, c’était A1 comme expérience », résume l’enseignant Steve Desfossés. « À un moment donné, il y avait même plus de chercheurs que d’étudiants. On a vraiment piqué leur curiosité. Un chercheur a passé toute sa fin de semaine avec nous parce qu’il trouvait nos résultats intéressants », ajoute-t-il, emballé.

Les résultats

« On était prêt à ne rien trouver, mais les résultats ont dépassé les attentes, même celles des chercheurs », explique M. Desfossés. « Hors de tout doute, on a montré qu’un matériau de revêtement pour les toits de la compagnie Soprema, l’olivine, permet de trapper certains gaz nocifs pour l’environnement, dont du NO2 et du HNO3 », ajoute M. Desfossés, fier de ses étudiants.

Même son de cloche du côté de Karine Routhier, quoique les élèves restent des adolescents et qu’il faille parfois faire de la discipline. « Nos jeunes ont montré qu’un biomatériau de la compagnie ontarienne Octane Orthobiologics, utilisé pour remplacer des vertèbres, pourrait accélérer la recalcification de l’os », explique Mme Routhier. Elle ajoute du même souffle qu’il s’agit tout de même de résultats préliminaires.

D’ici la fin de 2013, le programme Students on the beamline aura accueilli cinq équipes québécoises. Près de 50 jeunes auront ainsi repoussé, à leur façon, les limites de la science.

Projets futurs

Le travail des élèves ne s’arrête pas à leur retour des Prairies! Ils doivent rendre des comptes aux gestionnaires des compagnies avec lesquelles ils étaient jumelés. Ils auront ensuite à écrire de vrais articles scientifiques en anglais. D’ailleurs, des étudiants de Students on the beamline ont déjà vu leurs noms publiés dans des revues scientifiques révisées par les pairs!

Parmi les Québécois, certains se sont taillés une place dans des Expo-sciences nationales et internationales (Espagne). Un des élèves poursuit même un stage en milieu de recherche au célèbre Perimeter Institute en Ontario.

Qui disait que les jeunes d’aujourd’hui étaient paresseux?

Jean-Daniel Doucet est chimiste et chargé de projet pour Attraction chimique, une activité de vulgarisation itinérante et interactive pour les jeunes du primaire et du secondaire qui a remporté le Prix Relève Technoscience de l’ADRIQ en 2012. Titulaire d’une maîtrise en sciences biomédicales de l’Université de Montréal et d’un baccalauréat en biochimie de l’Université Laval, Jean-Daniel est également journaliste scientifique en herbe et récemment retraité de l’équipe du Québec de balle rapide.

 

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