Question et réponse avec Virginie Benjamin, directrice, Maison Léon-Provancher


Question et réponse avec Virginie Benjamin, directrice, Maison Léon-Provancher

Le mercredi 20 mai 2015

Le prochain congrès de l’ACS qui aura lieu le 6 juin 2015 aura pour thème La culture scientifique au Québec : crise et transformation. Mais comment se manifeste cette crise au sein des organismes de culture scientifique? Les restrictions budgétaires annoncées dans les médias ne nous en donnent qu’un vague aperçu. Et comme une crise est souvent l’élément déclencheur d’une transformation, les organismes touchés par les pertes de financement sont déjà en mode réflexion pour poursuivre leur mission.

Pour illustrer la situation et stimuler la réflexion en vue du congrès, l’ACS réalise des entrevues auprès d’organismes de culture scientifique œuvrant partout au Québec. Voici la troisième et dernière série d’entrevues.

Question et réponse avec Virginie Benjamin, directrice, Maison Léon-Provancher, située dans l’arrondissement Sainte-Foy–Sillery–Cap-Rouge, dans la ville de Québec

Depuis combien de temps existe la Maison Léon-Provancher?

L’organisme fête cette année ses 25 ans. La Maison de l’abbé Léon Provancher, où le naturaliste autodidacte du 19e siècle a vécu les 20 dernières années de sa vie (1872-1892), est toutefois beaucoup plus vieille. La corporation La Maison Léon-Provancher, qui occupe les locaux, n’a quant à elle été fondée qu’en 1990, tout de suite après la reconstruction de la maison qui avait été laissée à l’abandon. Aujourd’hui, nous poursuivons la mission de l’abbé Provancher en stimulant le goût des jeunes de 3 à 13 ans pour les sciences et la nature. Nous comptons six employés permanents et quelques animateurs surnuméraires.

Avez-vous subi des coupes dans votre budget ces deux dernières années?

Comme tous les autres musées, nous sommes touchés depuis 2006 par l’absence d’indexation de notre aide au fonctionnement de 27 000 $ du ministère de la Culture et des Communications du Québec. Cette subvention nous écarte, par ailleurs, des programmes de soutien du ministère de l’Éducation qui ne soutient pas les organismes muséaux et du soutien au fonctionnement du ministère de l’Économie, de l’Innovation et des Exportations (MEIE).

Les autres subventions gouvernementales aux projets sont quant à elles difficiles à décrocher. Par exemple, à l’échelle provinciale, le programme Novascience (volet Projets, MEIE) a été sur la glace durant 18 mois (du printemps 2013 à octobre 2014), alors qu’au fédéral le programme Promoscience du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) est très compétitif. En plus, peu de programmes soutiennent les activités une fois qu’elles ont été mises en place.

Quant à l’aide à l’emploi, des programmes de subvention salariale ont été coupés ces dernières années. C’est le cas du Programme d’échange étudiant interprovincial (PEI) du gouvernement provincial. Il y a aussi une incertitude d’une année à l’autre pour le programme d’emplois d’été de Jeunesse Canada au travail dans les établissements du patrimoine, financé par l’Association des musées canadiens.

À l’échelle municipale, plusieurs décisions de la Ville de Québec ont nui à notre fonctionnement. Par exemple, il faut maintenant majorer de 50 % les frais d’inscriptions des jeunes provenant de l’extérieur de la ville. Cette clientèle ne s’inscrit plus à nos activités. L’aide financière aux projets est aussi passée de 10 000 $ en 2011 à seulement 500 $ en 2015. Une série de frais administratifs ne sont finalement plus remboursés par la Ville.

Heureusement, nous avons plusieurs sources de revenus autonomes (revenus des ateliers, des camps de jour et des fêtes d’enfants, vente et location de matériel, cotisations des membres, etc.), ce qui compte pour près de 60 % de notre budget.

Par contre, comme les écoles sont nos principaux clients, les coupes dans le milieu scolaire nous touchent par ricochet. Nous observons depuis deux ans une baisse de 11 % de la clientèle scolaire.

Avez-vous des projets en péril pour les années à venir?

Pas pour le moment. Nous avons tout de même supprimé un poste d’animateur et sommes passés de quatre à trois animateurs permanents. Nous nous fions de plus en plus à des animateurs pigistes dont la situation d’emploi est très précaire.

Dans ce contexte de rigueur budgétaire, nous nous assurerons que chaque activité s’autofinance. Résultat, on coupe dans des activités gratuites auxquelles nous participions habituellement, comme le 24 heures de science. On se concentre sur ce qui est rentable.

Songez-vous à fermer dans la ou les prochaines années?

Non, ce n’est pas une option envisagée.

Quelles solutions envisagez-vous mettre en place pour faire face aux restrictions budgétaires actuelles?

Malgré les coupes, 2015 a été ma première année avec un budget équilibré à la Maison Léon-Provancher depuis que j’y suis, c’est-à-dire 2011. Nous tablons maintenant beaucoup sur les partenariats dans des projets. Par exemple, nous avons un contrat pour une animation sur la pêche à la base de plein air de Sainte-Foy (Québec). Les jeunes participants y seront initiés à la pêche lors d’une des cinq journées où l’activité sera offerte. L’expertise en animation et la connaissance des sciences naturelles de nos animateurs sont mises en valeur dans ce partenariat.

Le partage de nos ressources, comme les communications ou la comptabilité, avec d’autres organismes est aussi une autre solution créative envisagée.

Finalement, nous cherchons à développer le financement provenant du secteur privé. Or, c’est difficile pour un petit organisme d’offrir une visibilité appréciable. D’ailleurs, le Conseil de la culture des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches et la Société des musées du Québec offrent des formations abordables qui nous aident dans cette voie.

Nous relevons des défis chaque jour, mais nous ne baissons pas les bras, au contraire.

 

 

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