Questions et réponses avec Raynald Richer, responsable du Centre de démonstration scientifique du Saguenay–Lac-Saint-Jean


Questions et réponses avec Raynald Richer, responsable du Centre de démonstration scientifique du Saguenay–Lac-Saint-Jean

Le mardi 19 mai 2015

Le prochain congrès de l’ACS qui aura lieu le 6 juin 2015 aura pour thème La culture scientifique au Québec : crise et transformation. Mais comment se manifeste cette crise au sein des organismes de culture scientifique? Les restrictions budgétaires annoncées dans les médias ne nous en donnent qu’un vague aperçu. Et comme une crise est souvent l’élément déclencheur d’une transformation, les organismes touchés par les pertes de financement sont déjà en mode réflexion pour poursuivre leur mission.

Pour illustrer la situation et stimuler la réflexion en vue du congrès, l’ACS réalise des entrevues auprès d’organismes de culture scientifique œuvrant partout au Québec. Voici la troisième et dernière série d’entrevues.

Questions et réponses avec Raynald Richer, responsable du Centre de démonstration scientifique du Saguenay–Lac-Saint-Jean, situé au Cégep de Chicoutimi à Saguenay 

En quelle année a été fondé le Centre de démonstration scientifique (CDS)? 

Le CDS a fêté son 5e anniversaire l’année dernière. Notre mandat est de promouvoir les sciences et la technologie, particulièrement les sciences physiques dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Notre activité principale est la présentation de conférences-démonstrations interactives et itinérantes dans les écoles secondaires de la région.

Nous travaillons comme une PME. Mon technicien et moi faisons tout de A à Z, de la mise en scène en passant par la conception des démonstrations jusqu’aux réservations et aux présentations, la publicité et l’entretien du site Web. Seule la gestion des achats et des dépenses est administrée par le Cégep de Chicoutimi. Nous avons atteint plus de 20 000 élèves jusqu’à maintenant.

L’année dernière, nous avons reçu le prix régional Alphonse-Huard pour la promotion des sciences et technologies et nous venons de recevoir de l’Association canadienne des physiciens le prix ACP d’excellence en enseignement de la physique au secondaire et au collégial 2015.

Avez-vous subi des coupes dans votre budget ces deux dernières années?

Nos activités étaient principalement financées par le programme Novascience (volet Projets), suspendu pour réévaluation au printemps 2013. Chez nous, c’est grâce à la contribution du Conseil régional interordre de l’éducation et au programme Promoscience du gouvernement fédéral que nous avons réussi à survivre jusqu’à aujourd’hui.

De nombreux organismes attendaient avec impatience la réouverture du programme Novascience. La dernière compétition, lancée en octobre 2014, a donc été très féroce et, pour la première fois, nous n’avons pas obtenu le financement souhaité.

Parallèlement, les Conférences régionales des élus (CRE) ont été abolies. Chez nous, cela a entraîné l’élimination du Conseil régional interordre de l’éducation, un lieu de rencontre très profitable pour les acteurs de l’éducation scientifique et une source de financement pour nous.

À cela s’ajoutent les coupes dans le milieu de l’éducation (secondaire et collégial). Dans ce contexte, il est impossible pour notre cégep de fournir l’ensemble de notre financement.

Modifier de façon substantielle nos tarifs aux écoles n’est pas non plus une solution pour nous. Les montants recueillis ne couvriraient pas nos dépenses et, d’ailleurs, les écoles subissent aussi des coupures importantes.

En résumé, on a perdu nos soutiens financiers locaux et provinciaux, ce qui laisse un trou d’environ 100 000 $ sur un budget total de 125 000 $. Bref, l’avenir s’annonce difficile.

Songez-vous à fermer au cours de la ou des prochaines années?

À moins d’un miracle, nous mettrons la clé dans la porte en juin prochain.

Quels sont les projets qui disparaîtront?

Les conférences-démonstrations que nous offrions devront cesser, et ce, malgré leur popularité chez les élèves et les enseignants. Nous travaillions aussi à la formation de ces enseignants dans des projets de collaboration qui tomberont malheureusement à l’eau. Finalement, les organismes de promotion des sciences de la région bénéficiaient de notre savoir technique. Tous perdent un peu avec la disparition du CDS.

Quelles solutions avez-vous tenté de mettre en place pour faire face aux restrictions budgétaires actuelles?

Nous avons bien sûr cogné à la porte du privé. Mais cela demande énormément de temps pour, bien souvent, peu d’argent. Nous œuvrons dans un petit milieu et ne pouvons offrir aux entreprises qu’une visibilité locale. Or, les entreprises ne donnent pas pour le plaisir. Ça prend un retour sur l’investissement. C’est donc difficile de demander de gros montants en subvention. À coup de 10 000 $, ce qui est un gros don pour une entreprise de la région, on doit faire énormément de démarchage (dossiers, rencontres, démonstrations, etc.) pour combler nos besoins (100 000 $). Comme on est une très petite équipe, on risque d’investir tout notre temps dans la recherche de financement et beaucoup moins dans notre mission d’éducation.

Nous avons aussi envisagé, pour nous financer, d’offrir des conférences-démonstrations aux entreprises. Là encore, la question du temps disponible pour remplir directement notre mission, en plus de ces activités de financement, pose problème.

En dernier recours, nous tentons maintenant de nous positionner au Forum économique régional qui se tiendra le 18 juin prochain. Pourrons-nous y mobiliser le milieu? Nous verrons bien.

Mince consolation, comme je suis à la base enseignant au Cégep de Chicoutimi, je pourrai retourner à mon ancien emploi. Néanmoins, les activités du Centre créent deux emplois, mon remplaçant au Cégep et mon technicien, ce sera donc deux emplois de moins pour la région.

Si jamais le financement revient, nous pourrons relancer la machine. Mais si nous sommes absents trop longtemps, il sera difficile de refaire notre clientèle, sans compter que nous aurons perdu les services de techniciens hautement spécialisés.

 

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