Questions et réponses avec Guylaine Simard, directrice générale, Musée du Fjord


Questions et réponses avec Guylaine Simard, directrice générale, Musée du Fjord

Le jeudi 16 avril 2015

Le prochain congrès de l’ACS qui aura lieu le 6 juin 2015 aura pour thème La culture scientifique au Québec : crise et transformation. Mais comment se manifeste cette crise au sein des organismes de culture scientifique? Les restrictions budgétaires annoncées dans les médias ne nous en donnent qu’un vague aperçu. Et comme une crise est souvent l’élément déclencheur d’une transformation, les organismes touchés par les pertes de financement sont déjà en mode réflexion pour poursuivre leur mission.

Pour illustrer la situation et stimuler la réflexion en vue du congrès, l’ACS réalise des entrevues auprès d’organismes de culture scientifique œuvrant partout au Québec. Voici la deuxième série d’entrevues.

Questions et réponses avec Guylaine Simard, directrice générale, Musée du Fjord, situé dans l’arrondissement de La Baie, à Saguenay

En quelle année le Musée du Fjord a-t-il été fondé?

Le Musée a été fondé en 1967 par de jeunes scouts dans une maisonnette en bois dans la municipalité de Port-Alfred. En 1983, le Musée entre dans une nouvelle phase de son existence et devient le Musée du Fjord. Le Musée possède maintenant des installations modernes et une vue imprenable sur les rives du fjord du Saguenay. 

Avez-vous subi des coupes dans votre budget au cours de ces deux dernières années?

Comme beaucoup de musées, nous sommes touchés depuis 2006 par le retrait de l’indexation de l’aide au fonctionnement du ministère de la Culture et des Communications du Québec et la disparition d’autres programmes gouvernementaux. Par ailleurs, à cause des coupes dans le milieu scolaire, le budget de transport des écoles diminue de plus en plus. Les visites au musée écopent. 

Pour les visites familiales, les musées sont en concurrence avec d’autres destinations touristiques. On doit toujours renouveler notre offre avec un contenu multimédia interactif innovateur qui saura plaire aux visiteurs de plus en plus exigeants, et ce, malgré nos moyens restreints. Parallèlement, la baisse économique entraîne une diminution de la contribution des partenaires privés. Malgré cela, nous demeurons optimistes. Notre mission est singulière, nous avons une excellente notoriété et de bonnes pratiques d’affaires!

Cela dit, en 2014, 30 % de nos revenus proviennent de nos opérations commerciales et de commandites du privé; plus spécifiquement, 350 000 $, dont 50 000 $ du secteur privé. Dans les faits, une autre somme de 455 000 $ émane des revenus autres que du provincial (subventions du gouvernement fédéral, de Ville de Saguenay et autres).

Finalement, le programme fédéral de soutien à l’embauche, Carrière-été, nous permet d’engager des guides chaque été. Si l’on abolissait ce programme, ce serait dramatique pour l’ensemble de notre offre. Comme l’aurait dit mon grand-père « pour avoir l’“ordinaire”, on doit toujours être extraordinaire ».

Est-ce que certains de vos projets sont en péril pour les années à venir?

Pas pour le moment. Ma hantise, c’est qu’on devienne « un musée où personne ne va », comme le chantait Marie-Denise Pelletier dans Je m’imagine! Un musée doit faire partie de son milieu, particulièrement en région! Et il doit renouveler son offre pour garder et élargir sa clientèle. Heureusement, nous avons pu bénéficier de la fin 2010 à mai 2012 d’un investissement de 4,1 millions de dollars d’un programme spécial conjoint des gouvernements provincial et fédéral pour développer les destinations des ports d’escale des croisières internationales, d’une subvention spéciale du ministère de la Culture et des Communications pour renouveler une exposition permanente et de l’aide du secteur privé. Cet argent a permis de renouveler notre programme muséal dont profite aussi le port d’escale de Saguenay.

Aujourd’hui, cette aide est épuisée; on doit impérativement rassembler minimalement 350 000 $ en revenus autonomes, dont 209 000 $ en revenus d’entrées pour boucler le budget 2015-2016. Nous n’avons pas encore cet argent. Si j’avais le choix entre rencontrer Mick Jagger et Lorne Trottier (la Fondation de la famille Lorne Trottier promeut notamment la science et la technologie), je choisirais ce dernier sans hésitation! Et j’adore la musique rock!

Songez-vous à fermer au cours de la ou des prochaines années?

Non, j’aurais la sensation de faillir à mon devoir. Le niveau d’eau du fjord monterait à cause de mes larmes! Plus sérieusement, la communauté aime profondément le Musée. C’est probablement une particularité de certains organismes régionaux. Je pense qu’avant d’en arriver à une fermeture, le milieu viendrait à notre rescousse.

J’espère que notre nouveau plan quinquennal nous évitera cette situation et nous permettra de continuer d’être un acteur important en vulgarisation scientifique au Saguenay et au Québec.

Quelles solutions envisagez-vous mettre en place pour faire face aux restrictions budgétaires actuelles?

Nous faisons moins de choses, mais mieux. On concentre nos efforts sur un ou deux événements d’envergure, comme le festival Fous de la science qui a touché plus de 6 000 personnes en 2014. C’est une excellente visibilité pour le Musée.

Nos expositions durent plus longtemps pour minimiser les coûts de conception. Certaines de ces expositions itinérantes sont louées partout au Québec, au Canada et même en France, ce qui ajoute à nos revenus.

D’autre part, notre créneau scientifique nous distingue des autres organismes de la région. Le marché est petit. On cherche la complémentarité et le travail en partenariat. Par exemple, pour la dernière semaine de relâche — un autre de nos événements phares — nous avons collaboré avec la station de ski locale (Centre de ski Mont-Bélu) et avec Pêche Blanche du Fjord pour offrir des forfaits à rabais pour des visites combinées. Les activités spéciales au Musée étaient quant à elles offertes par plusieurs partenaires à tarifs réduits. Même l’épicier du coin a mis la main à la pâte en distribuant du chocolat chaud aux visiteurs! Le Musée est donc solidement ancré dans son milieu.

 

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