Pas de sorties scientifiques pour les élèves en 2018-2019?


Le mardi 10 juillet 2018

L'ACS s'inscrit dans le débat sur la gratuité scolaire

Pas de sorties scientifiques pour les élèves à la rentrée ?
Lettre parue dans Le Devoir du 10 juillet 
Lettre parue dans Le Soleil du 11 juillet
 
 
Les membres du conseil d’administration de l’Association des communicateurs scientifiques du Québec
et
Félix Maltais C.M., fondateur, Les Débrouillards, Les Explorateurs et Curium, membre émérite de l’Ordre de l’excellence en éducation
Isabelle Vaillancourt, éditrice, Publications BLD
Guylaine Simard, directrice générale, Musée du Fjord
Jacques Kirouac, directeur général, Science pour tous
Joël Leblanc, Zapiens Communication scientifique
Martin et Stéphane Brouillard, Les Neurones atomiques
 
Si rien n’est fait rapidement, les élèves de nombreuses écoles québécoises pourraient passer la prochaine année scolaire sans sorties ni activités éducatives scientifiques. Depuis le début juin, et malgré une directive publiée par le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, un « flou » subsiste sur la question des frais afférents à charger ou non aux parents des élèves pour ces sorties et activités. Le Ministre et la Fédération des commissions scolaires du Québec se renvoient en vain la balle à ce sujet, et c’est ultimement une « table nationale » qui veillera à (re)définir la gratuité en milieu scolaire[1]. Inutile de dire que les conclusions de cette table ne seront pas connues de sitôt…
 
L’Association des communicateurs scientifiques du Québec (ACS) et les organismes de culture scientifique déplorent la situation, car l’été est la période où les programmes se mettent en place dans les écoles et où les enseignants reçoivent le budget alloué aux activités pour l’année. Or, on apprenait récemment que des sorties culturelles sont annulées, selon le cri d’alerte lancé par des organismes culturels le 18 juin (RIDEAU, TUEJ et la SMQ), et des musées de science s’inquiètent avec raison : le Musée de l’ingéniosité J. Armand Bombardier a perdu l’entente qu’il avait avec l’école secondaire locale et le Musée du Fjord, de son côté, craint de perdre la plupart de ses réservations scolaires et anticipe d’importantes pertes de revenus. De nombreux enseignants ont également manifesté leur regret de ne pouvoir renouveler leurs abonnements aux magazines scientifiques Les Explorateurs, Les Débrouillards et Curium, qu’ils utilisent pourtant abondamment en classe, et ce, par manque de précisions sur les budgets pour l’année scolaire à venir.
 
L’importance de la culture scientifique dans la société n’est pourtant plus à démontrer, et son acquisition est d’autant plus fondamentale chez les jeunes publics. Pour éveiller leur curiosité, certes, et parce que les activités de culture scientifique génèrent souvent l’étincelle à l’origine d'une carrière scientifique. Mais aussi et surtout pour que les jeunes comprennent le monde dans lequel ils grandissent et pour qu’ils apprennent à l’interroger. Si on apprend tôt le « comment » et le « pourquoi » des choses, si on est initié tôt au raisonnement scientifique, on développe un esprit critique, on prend des décisions éclairées et on devient un citoyen avisé.
 
Les organismes de culture scientifique contribuent directement à cet apprentissage. Dans un avis publié en 2013[2], le Conseil supérieur de l’enseignement rappelle leur rôle important pour « stimuler l’intérêt des élèves et soutenir les enseignants de science et de technologie » (p. 74). Le Conseil rappelle en outre que les organismes « ont déployé des efforts importants dans le contexte du renouveau pédagogique afin d’adapter leurs ressources et leurs services aux besoins des enseignants et aux exigences du programme de science et technologie » et souligne que ces efforts doivent être « encouragés » et « appuyés » (p. 74).
 
Il y a urgence d’agir, c’est pourquoi l’ACS et les organismes de culture scientifique demandent aux commissions scolaires et au Ministre Proulx de s’entendre rapidement sur des balises claires, afin de ne pas priver les élèves de sorties et activités scientifiques et de permettre aux organismes extérieurs à l’école de jouer leur rôle fondamental de soutien pédagogique aux écoles. La culture scientifique, disait Fernand Seguin en 1988, « c’est la remise en question, c’est un regard neuf sur les choses sans prendre les résultats pour définitifs ». En d’autres termes, « c’est le sens de la liberté[3] ». Si les décideurs et les autorités ministérielles ne s’entendent pas à court terme, ce sera une année de gaspillée pour la transmission de cette liberté à nos enfants.


[1] Le 7 juin, le ministre émet une directive sur la gratuité des services éducatifs et des manuels scolaires. Le 20 juin, en réaction à l’incertitude des commissions scolaires quant à la façon d’appliquer la directive et quant aux montants dont elles bénéficieront pour l’année 2018-2019, le Ministre tente de se faire rassurant et rappelle que de l’argent est disponible pour les sorties et le matériel. Le 28 juin, on apprend que la Fédération des commissions scolaires du Québec fait circuler une liste qui balise l’application de la directive sur les « objets », mais l’incertitude demeure pour les sorties éducatives, dont la gratuité ne sera valable que si elles sont « en lien avec le programme de formation de l’école québécoise ». C’est la « table nationale » qui établira ledit « lien » entre les activités et le programme.

 

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